Éducation|-. Apprendre aux enfants à travailler en équipe, un défi pour l’enseignement haïtien.

Éducation|-. Apprendre aux enfants à travailler en équipe, un défi pour l’enseignement haïtien.

En Haïti comme partout ailleurs, souvent on conseille à nos enfants en leur disant : «pour réussir dans la vie, s’assurer une belle carrière professionnelle, il faut étudier beaucoup». Un conseil parmi tant d’autres qui traduit bien l’idée selon laquelle l’éducation est la clé de la réussite, l’arme du succès. Toutefois, parler d’éducation nécessite qu’on se penche à fond sur cette question fondamentale: de quelle éducation parle-t-on? En quel sens l’éducation peut assurer la réussite de nos enfants dans un monde dominé par l »exclusion sociale où les formes d’individualisme les plus extrêmes y prédominent malgré les efforts consentis pour lutter contre cette dernière? Mais aussi et surtout, l’éducation donnée aux enfants en Haïti favorise-t-elle le travail collectif ?

Selon le dictionnaire Larousse, l’éducation est définie comme étant l’action de développer les facultés physiques, intellectuelles et morales. Elle est aussi la connaissance des usages de la société.

En Haïti, dans la majorité des institutions qui offrent une formation pédagogique, celles-ci n’inculquent pas aux jeunes apprenants qu’elles sont formés pour devenir des citoyens responsables, le sens du travail collectif. Cependant, des efforts sont consentis partout ailleurs pour lutter contre l’exclusion sociale. Des politiques sont aussi mises en œuvre dans plusieurs pays pour pallier aux problèmes liés à cette dernière. L’individualisme est facteur d’exclusion sous toutes ses formes si l’on comprend le philosophe Patrick Viveret, auteur de Reconsidérer la richesse.

Maintenant, les richesses se construisent d’avantage en nom collectif même si beaucoup d’efforts restent encore à faire. Grâce à l’essor des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), les individus sont hyperconectés. Le monde est devenu un village global où des réseaux (sociaux, économiques, politique, etc.) sont reliés les uns aux autres. Gérer ou faire partie d’un quelconque réseau, être interactif, etc. tels sont les conditions préalables à l’ère de l’informatique d’accéder au succès espéré des parents. Un succès qui a pour base la capacité de travail en équipe, de construire des réseaux.

Le travail collectif dans l’enseignement en Haïti pour lutter contre l’individualisme.

Le travail en groupe ou travail collectif est défini, d’après Elizabeth G. Cohen comme une situation où des élèves travaillent ensemble dans un groupe suffisamment petit pour que chacun puisse participer à la tâche qui lui a été clairement assignée. De plus, on attend à ce que les élèves exécutent leur tâche sans la supervision directe et immédiate de l’enseignant.

D’après la même auteure, le travail de groupe est une technique efficace pour atteindre certains objectifs d’ordre intellectuel en ce qu’il permet de développer chez l’enfant la capacité à résoudre des problèmes en faisant appel à la créativité et aux habilités d’expression orale.

En Haïti, une grande majorité des parents ont la mauvaises habitudes de représenter l’école (la bonne) comme étant un lieu où des enfants sont sous le contrôle total d’un. e enseignant. e qui leurs sermonnent comme un pasteur en haut de sa chaire. De par le comportement qu’ils ont d’exiger leurs enfants d’être «toujours» les premiers de leur classe, ils développent chez ces derniers la compétitivité qui leur conduit parfois à considérer les autres élèves de la classe comme des adversaires à vaincre. Donc, leurs enfants évoluent dans un univers scolaire qui, d’abord, ne prennent pas en compte leur sens de créativité, leur compréhension puisqu’il faut étudier en retenant l’intégralité de la leçon. Ensuite, où le résultat obtenu dans le bulletin scolaire compte plus que l’apprentissage lui-même. Ce qui a pour résultat : l’enfant fait tout pour réussir.

Au contraire, l’école doit être un lieu où l’enfant puisse libérer sons sens de créativité. Lui apprendre, et ce, dès le plus jeune âge, à exprimer ses pensées. Ce qui est tout le contraire en Haïti où l’on apprend à l’enfant «à se taire et écouter le professeur».

Cohen parle aussi d’objectifs d’ordre social du fait que le travail de groupe améliore les relations entre élèves en faisant croître la confiance et l’amitié. Ainsi, en prenant en compte de l’approche de cette auteure en ce qui concerne le travail de groupe ou travail collectif, on peut reconnaître que cette méthode serait d’une grande utilité dans l’enseignement en Haïti.

Dans la plupart des écoles sus-mentionnées qui ne prennent pas en compte cette méthode, les élèves développent des attitudes à tendances individualistes et compétitives qui leur resteront jusqu’à l’âge adulte. Ces enfants, une fois adulte, seront probablement incapables de constituer des groupes professionnels, de développer des réseaux sociales et/ou professionnels voire ne seront pas en mesure de créer avec d’autres une entreprise en nom collectif pour s’assurer une indépendance financière. Ces attitudes sont souvent le résultat d’un manque d’habitude à travailler en équipe ou en groupe. Une habitude que les enseignants devront inculquer chez leurs jeunes apprenants. Un enfant éduqué est un agent de développement. Par contre, un enfant mal éduqué peut développer des comportements qui ne sont pas favorables à la communauté à laquelle il appartient. Des mauvaises méthodes d’enseignement, peuvent naître des comportements à tendances individualistes ou égoïstes comme: l’intolérance, la méfiance

L’éducation en Haïti doit s’appuyer sur des méthodes plus efficaces dont l’une d’entre elles est le travail collectif. Les institutions qui offrent une formation pédagogique doivent pencher en faveur d’une éducation beaucoup plus interactive. Ce qui inculquerait chez les citoyens que nos institutions forment pour la société haïtienne des valeurs comme:

1- La reconnaissance de l’autre.

Le fait de travailler habituellement en groupe dès le plus jeune âge, des groupes hétérogènes surtout, c’est-à-dire qui comprennent plusieurs élèves présentant chacun des attitudes et des comportements plus ou moins distinctes, permettraient aux écoliers le sens de la reconnaissance de l’autre. L’écolier aura le temps d’apprendre des autres écoliers, ces camarades faisant partie du groupe qui, en retour, apprendront aussi de lui. Ainsi, ils seront plus tolérant les uns envers les autres puisque chacun sera exposé au déficit intellectuel, social et économique des autres.

2- Le sentiment d’appartenance à un groupe.

Le fait d’avoir développer l’habitude de travailler en groupe depuis son jeune âge, suscitera chez l’individu adulte le souci de constituer des réseaux. Il sera plus interactif à son entourage. Ce qui lui permettra de mettre de côté «l’individualisme» qui pousse parfois à toute sorte de «compromissions» dans le seul but de «réussir seul» dans la société. Le sentiment d’appartenance à un groupe peut susciter chez un individu l’amour de la réussite collective.
3- Le sens de la responsabilité au sein du groupe.
D’après Antoine St-Exupery, être responsable, c’est s’assumer. Dans une communauté donnée, un citoyens a des responsabilités. Donc, il doit se sentir responsable. Il doit avoir un rôle, une tâche, une occupation pour le moins. Une attitude qui se développe chez l’individu une fois que celui-ci apprenne l’importance du groupe dans lequel il fait partie.
Faute de méthodes efficaces pour inculquer tous ces valeurs ainsi que d’autres aux jeunes apprenants ou écoliers, l’enseignement donné au sein de la grande majorité des institutions qui offrent, moyennant finance ou pas, une formation pédagogique, n’assure pas la réussite proprement dite puisque les individus qu’il façonne ne seront pas des agents de développement mais, fort souvent dans le pays, des agents de sous-développement puisqu’ils auront des comportements à tendance individualiste où la réussite personnelle est prise en compte. On veut réussir pour montrer aux autres qu’on a réussi. Une forme de réussite qui suscite, bien souvent malheureusement, la compromission menant à la corruption.

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